Paris/Biarritz Comment j'ai rencontré l'humanité
- Fanny Inesta
- il y a 6 jours
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : il y a 5 jours
La Factory, Chapelle des Antonins
5 Rue Figuière Avignon
DU 5 au 26 Juillet à 14h20
Relâche les 8,15,22

Dans ce très beau lieu de la chapelle des Antonins, ce seul en scène de et avec Franck Lorrain, est une confidence. C’est un théâtre de la mémoire, de la chair et du lien. Son histoire nous emmène sur les pas d’un jeune homme de 18 ans parti, un été, marcher seul de Paris à Biarritz. Huit cents kilomètres, vingt-huit jours, et une traversée humaine bouleversante.
Ce qui pourrait n’être qu’un récit initiatique devient ici un manifeste. À mi-chemin entre le journal de bord et un témoignage, Franck Lorrain incarne chaque pas, chaque rencontre, chaque vertige. Toujours en mouvement, sans relâche, comme le marcheur qu’il fut, il emplit l’espace avec une folle énergie . Sa parole résonne, son corps raconte, sa voix,celle que l’on a tant entendue au cinéma sans souvent la reconnaître, nous enveloppe. Mais Paris-Biarritz, c’est aussi autre chose... D’un physique singulier, petite taille, visage juvénile, qui fut trop souvent mal perçu, instrumentalisé, rejeté, Franck Lorrain livre, avec une sincérité brute, les blessures de l’enfance : l'alcoolisme d’un beau-père, un prêtre prédateur, les mauvaises rencontres, les regards réducteurs posés sur lui plus tard, quand il n’était vu que comme un joli garçon par ceux qui ne voulaient pas entendre sa parole. Il dit la colère, le désespoir, l’humiliation. Mais il dit aussi, et c’est peut-être le plus bouleversant le pardon. Non comme une absolution naïve, mais comme une reconquête de soi. Dans ces moments de vérité crue, son corps devient mémoire, résistance, résilience. Et là encore, le théâtre prend tout son sens : non pour fuir, mais pour dire, pour affronter, pour libérer.
La mise en scène, signée Séverine Lathuillière, est à la fois sobre et résolument cinématographique. Un plateau nu, des images projetées, des sons captés en chemin : chaque élément compose une écriture visuelle précise, presque séquencée. On pense parfois à un road-movie intérieur, tant l’art du cadre, du rythme et de la lumière guide notre regard. La lumière, en clair-obscur, devient narration. Elle scande le temps, celui de la lune, du soleil, des heures qui passent, des villes qui défilent. Pour nous, spectateurs, c’est un fil invisible entre le réel et le souvenir, entre l’espace du théâtre et la géographie intime de la marche. Une épure qui bouleverse. Franck Lorrain, en chair et en souffle traverse la pluie fend les eaux. Ces moments suspendus, d’une beauté plastique saisissante, bouleversent. On y perçoit, dans la brume, les échos de notre propre humanité.
Car ce que raconte Paris-Biarritz, au fond, ce n’est pas seulement un voyage. C’est un état du monde. Une époque où l’on tend encore la main. Où l’on s’assoit à la table d’un inconnu. Où l’on écoute. Franck Lorrain, réhabilite l’hospitalité, le don, la vulnérabilité. Trente ans après ce périple fondateur, il nous livre son vécu.
Il est aussi acteur, réalisateur, producteur, militant, instructeur de plongée ou président de club de rugby… Son parcours, comme son spectacle, est empreint d’une générosité qui refuse les postures. Il ne prêche pas. Il partage.
On sort de cette pièce, le cœur un peu plus vaste, les yeux ouverts sur les petits miracles du quotidien: une main tendue, un silence partagé, un orage traversé. Ce n’est pas un retour nostalgique. C’est un acte de foi en l’humain.Et c’est terriblement précieux.
À l’issue du spectacle, l’émotion se prolonge dans un geste généreux : Lilly’s , inspirée par ce voyage initiatique, a imaginé un jus de fruit maison baptisé Paris/Biarritz , alliance fraîche et inattendue, comme la pièce elle-même. Un breuvage délicieux, que Franck Lorrain offre au public avec la même chaleur que celle qu’il célèbre sur scène. Une invitation à poursuivre la rencontre autrement, à la lumière d’un sourire, d’un goût, d’un partage. Vous pourrez retrouver ce jus tout au long du festival, dans son bar à jus Lilly’s, place Saint-Didier Avignon
Fanny Inesta
De et avec Franck Lorrain
Mise en scène: Séverine Lathuillière
Musique: Olivier Daviaud
Création son: Nicolas Delbart
Création lumière: François Alapetite
Diffusion: Marie Barbet Cymbler
Presse: Lynda Mihoub
Une avant-première de qualité et qui laisse présager un beau succès !
Ouah quel article! Et quel parcours! Je suis admirative de ces mots et emballée pour découvrir! Voilà ce spectacle est noté ds mon agenda! Bravo!
Une critique qui m'incite à aller voir ce spectacle durant le festival! Je ne serai là que 3 jours mais assurément que celui-ci, j'irai le voir!!!