Fanny Inesta
The Requiem of Sophie Withman
Dernière mise à jour : 24 mars
FEST HIVER AVIGNON 2023
Théâtre Arthéphile Avignon

Après une douce préparation pour accueillir l’artiste, Sophie Withman, la grande artiste, la voilà qui arrive moulée dans un pantalon de cuir noir et nymbée de mystère. Elle entre en scène avec un hyper maquillage, des cils recourbés à embrocher la terre entière, un rouge à lèvre pour le moins déconcertant… un peu dégoulinant, à l’image de ce qu’elle va être …une artiste en pleine déconfiture, en plein requiem pourrait on dire.. Alors elle ne va pas se priver pour nous entraîner dans la spirale de sa chute sans fond, elle prend à bras le corps sa situation et fait suivre derrière elle un public un peu déboussolé qui l’ accompagne sans maugréer.Tout en elle respire l’échec, la chute, le désamour. Elle va s’appuyer sur les spectateurs pour développer sa situation dramatique, son amour perdu d’avance, telle une walkyrie sans arme issue des contes nordiques. Le soir où nous l’avons vue, elle eut une chance inouïe au travers des spectateurs choisis pour participer à sa quête inassouvie. lls ont fourni plus que le possible, rentrant dans son jeu sans retenue. Elle est un personnage dans la décrépitude totale, elle n’a rien pour se relever, elle chute et chute encore, sans filets. Elle a tout est prévu pour assurer une fête resplendissante, des fleurs ont été placées sur chaque siège, un dîner en tête à tête, du parfum, une rose etc. …pas un détail n’est oublié. Et pourtant l’issue est fatale, le trajet de la chute est déjà préparé. Clémence Caillouel est une excellente comédienne qui n’a pas peur de donner une image décalée d’elle même. C’est dans ce sens qu’elle appartient à l’univers clownesque. Une sacrée comédienne dont le spectacle est d’une originalité folle. On vogue sur les traces de Paul et Virginie, de madame de Clèves, de Tristan et Iseult…on vogue …enfin elle vogue seule en quête du héros absolu qui lui apportera l’amour espéré.
Jean michel Gautier
De la compagnie La Volada,création Avec: Clémence Caillouel Co-direction : Gözde Atalay
Critique de Fanny Inesta :
Une démarche chaloupée et outrageusement maquillée, la Star entre sur scène. Son histoire pourrait être belle si Sophie Withman n’était pas aveuglée par son obsession de gloire et sa recherche du grand amour.
Fiction et réalité se mélangent tant elle rêve sa vie. Mais encore faudrait -il être à la hauteur! Elle s’empare du micro et aussitôt le ton est donné et les rires fusent dans la salle. Quelques notes en anglais où elle incite plusieurs personnes du public à l’accompagner, elle jette son dévolu sur l’un d’entre eux qui passera une bonne partie de la pièce sur scène et soulignons le, avec une belle aisance !Elle se fond corps et âme dans son personnage qui devient vite hors de contrôle, l’insensé de ses actes, les uns se reversant dans les autres pour créer le canevas d’un mémorable moment. Une jolie table dressée, des multitudes de fleurs, des objets et même un bébé, signes visibles d’un monde idyllique qui l’habite dans ses rêves , elle les bouscule, les démonte, jusqu’à tout détruire. Une fuite de la réalité qui l’enferme dans un schéma qui va la conduire inexorablement à sa perte, à ses échecs à ses déchirures. Un spectacle qui donne chair et brutalité à cette farce-miroir, si drôle dans la forme et si tragique dans le fond. Car on rit beaucoup. Clémence Caillouel que nous avions déjà vu dans « Paulina » l’une des victimes du féminicide mexicain, spectacle pour lequel plusieurs prix lui ont été décernés, et cet été dans « le chevreuil et Dalida », une tragédie contemporaine, elle nous offre ici une autre facette de son talent. Elle sait passer d’un registre à un autre, empreintant ici ,la la saveur et la force de la farce dans la satyre du burlesque, ce qui fait d’elle une comédienne intense et captivante.
Fanny Inesta