Structurer mon désir
- Nadine Eid

- 21 juil.
- 3 min de lecture
FESTIVAL AVIGNON OFF 2025
Structurer mon désir (suite et fin)
Lecture intégrale performative et théâtralisée
Conservatoire d’Avignon Pôle danse
20 rue Ferruce Avignon
le 18 juillet à 17h15
De Jean Michel Guieu
par Clin, Christophe Lancia et Jean Michel Guieu
On n’est jamais excusable d’être méchant, mais il y a quelque mérite à savoir qu’on l’est ; et le plus irréprochable des vices est de faire le mal par bêtise.
Charles Baudelaire
Suite à une lecture Cf . Structurer mon désir du 17 juillet 2024, du même auteur dans les Arts Liants, les comédiens Jean Michel Guieu, Christophe Lancia et Clin ont, pour le Off 2025, présenté cette pièce de Jean Michel Guieu dans son entièreté. Merci de bien vouloir lire en priorité ce qui concerne la lecture du 17 juillet 2024 afin de ne pas faire redondance ici avant que de poursuivre par les lignes ci-après.
Pour cette suite et fin, nous retrouvons les parents de Jimmy, toujours très amoureux et toujours gentiment inconscients de la présence parfois encombrante de ce fils déscolarisé qui se trouve fréquemment non loin de leurs ébats. Jimmy grandit et dans sa langue, des structures semblent se réaliser à son insu ou plutôt à l’insu des siens. Jimmy comprend, formule, voit et écoute mais semble encore très fragile, à fleur d’émotions en permanence. Le père annonce un déménagement imminent afin de décrocher un emploi. Pour Jimmy et sa mère c’est la rupture d’un équilibre précaire avec l’arrivée de peurs légitimes. Il va falloir à nouveau rencontrer l’inconnu ; le changement est source d’une immense angoisse. Quitter le sud pour retourner presqu’au lieu dont on est déjà parti peut paraître aussi comme régressif. Puis, un accident va radicalement détourner le parcours de vie de Jimmy et son quotidien va en être considérablement modifié.
Structurer mon désir n’épargne pas la bêtise mais la condamne car elle est souvent l’apanage de ceux qui, certes en sont victimes, mais néanmoins font, par bêtise, des victimes.
Les parents de Jimmy sont bien sûr des parents aimants mais également peu conscients de certains enjeux.. De paroles en paroles, d’attitudes en comportements, le lien d’amour souligne la distance abyssale entre la mère et ce qui caractérise Jimmy. Molesté en sa présence comme en son absence pour Jimmy les mots sont des balles qui font mouche. Elles signifient la perception, la manière d’être et d’aimer cet enfant mal perçu, stigmatisé par des structures ou leurs absences. Sa déscolarisation est glaçante, atroce et pleinement irresponsable tout autant que peut l’être une scolarisation qui ferait de lui un bouc émissaire. Les deux sont non satisfaisantes.
La sphère familiale n’est pas remise en question même s’il y manque parfois la protection efficace, celle qui permet à l’enfant de s’édifier peu à peu en confiance et dans la joie. La bienveillance comme l’amour sont indéniables mais l’équilibre fait défaut. Le père comme la mère semblent deux grands enfants. La souffrance de Jimmy est telle que des pathologies paraissent poindre. Dans une singulière inconscience due à une bêtise parfois proche de la débilité, le couple parental dialogue et profère des inepties qui nous le fait apparaître comme peu responsable au regard des effets destructeurs du langage inadapté pour Jimmy. L’interprétation est un sans faute pour le couple et Clin et Jean Michel Guieu modulent avec brio les registres de leurs rôles aux facettes en évolution permanente.
Quant à l’enfant, Christophe Lancia en fait un rôle extraordinaire tant la vélocité labile de son élocution nous percute et peu à peu, trouve l’expression d’une extrême justesse, celle de la véracité des victimes. Dans cette fatalité, la puissance du langage de Jimmy puise ses racines dans un vécu réel qu’il peut alors identifier, nommer et partant le mettre sur la voie de la résilience. Le lien mère- fils après le départ du père déconstruit les approximations des ressentis dus aux déconsidérations et aux maltraitances de ses camarades. Pour Jimmy il s’agit de se réapproprier, de découvrir dans le sens de révéler un autre langage afin de gagner l’estime de soi par celles des autres.
Nadine Eid
Bluffant et puissant ! L’enfance maltraitée abordée en finesse comme un problème sociétal majeur.















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