Quand la neige fond entre mes cuisses
Théâtre Transversal
10-12 Rue d’Amphoux Avignon
du 29 juin au 21 juillet 2024 relâche les mardis
Avant même que d’entrer en salle, il nous est proposé d’accepter l’apposition de deux tampons à la gouache sur nos avant bras. Un coeur rouge sur le gauche pour refuser et un trait vertical sur le droit pour accepter. Dans cette performance interactive, toutes propositions faites entre les performeurs ou avec le public reposent sur le consentement. Le public est avisé qu’il a toute latitude de partir en cours de spectacle si cela est son souhait, pour s’absenter un moment ou partir. La liberté d’agir est posée. Confortable préambule qui peut sembler une évidence alors même que les interdits nous limitent jusque dans nos besoins élémentaires.
Il est question d’érotisme, de désir et partant avant tout de liberté même si le terme finalement est peu utilisé car il lui est substitué celui de consentement, plus actant.
Ici le « qui ne dit rien consent n’est pas de mise ». En effet, le spectacle est et se veut éminemment participatif. Formuler ou signifier son accord est le passeport exigé tout au long de la performance. Montrer la ligne verte ou dire vert c’est créer. Montrer le coeur rouge- doublement symbolique de l’amour dans la forme et de l’érotisme par la couleur, elle même ambivalente symbolique du danger du sang- c’est créer aussi par le refus.
Ça commence par la parole, « ce qui m’excite c’est… ». Les cinq personnes
queers en scène tentent une à une de cerner ce qui motive leurs désir sexuel, ce qui le crée. Etonnement. Sur la toile déployée au sol, destinée à signifier la scène comme un espace de déploiements érotiques, tous s’essaient, en priorité, à formuler librement les lieux de leur désirs, ceux qui exacerbent leurs pulsions, marquent leur libido et nourrissent leur fantasmes. Pour simplifier, il y est question de limites, celles qu’on a envie de poser par apport à soi-même. Ce qu’on aime ou n’aime pas devient ce que l’on veut et demande et, là encore, on peut obtenir un non ou un accord. Il est question bien sûr de faire le tri de ce qui relève de soi ou des tabous instillés par l’éducation parentale, la religion, notre civilisation judéo-chrétienne, le carcan des transmissions réductrices du système hétéropatriarcal.
La mise en scène relève de l’intime. Tous sont en présence collective et se déterminent en singularité nommée à explorer. Chacun des cinq a son portant avec ses vêtements et accessoires. Les lumières dessinent les domaines privées comme des lieux garants de leur individualité.
La toile au sol est l’espace de la communauté, le lieu où les corps peuvent se rencontrer, s’esquiver, se frôler, s’unir. Les tableaux successifs sont autant de scènes improvisées en création, élaboration empirique des corps devenus vecteurs de désirs personnels à découvrir ensemble.
Il y a dans cette recherche deux axes constants : l’écoute attentive du corps et le respect des pulsions pour aboutir à la prospection du désir sans tabous.
La danse et les corps en contact/lien comme les paroles en écriture poétique du désir inscrivent la joie au coeur du dynamisme de la quête.
La sonorisation des bruits des corps, des souffles et des voix assourdies élabore un espace où l’intime tisse des ponts puis les liens. Il y a alors, rendue visible au public, l’attirance magique. Le mouvement du désir circule en permanence, et il se cueille à point nommé en communauté liée par une même certitude politique, celle de pouvoir construire après avoir déconstruit une libido curieuse et inventive, respectueuse de la richesse de nos pulsions et de nos fantasmes.
A découvrir, au Transversal sans a priori en laissant au vestiaire les scories des tabous brûlés en autodafés sur les barricades érotiques de mai 68.
Nadine Eid
mise en scène Collectif NU.E.S
Interprétation et création
Juliette Pottier Plaziat
Myriam Foisy
Adam.M
Jonathan Sardelis
Gui Taurines
Assistance mise en scène et Création
Maude Choquet-Blanchette et Roxanne Bédard
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