Papy et Mamy

FESTIVAL OFF AVIGNON 2025

Théâtre Les 3S - Le Quatre

rue Buffon

du 4 au 26 Juillet

Dans leur salon jauni par les années et leurs napperons en crochet, Papy et Mamy ne se parlent plus, ou si peu. Comme leur vieille pendule, ils oscillent, ils grincent, ils s’enlisent doucement dans le ronron de la routine. Lui est cloué à sa chaise roulante, elle, un peu bancale de l’esprit, mais vaillante de corps, tente de tenir le cap. Dans cet intérieur étriqué, le quotidien pèse. Et le réel frappe à la porte : une aide à domicile, un kiné. Deux intrusions dans leur monde feutré, qui vont bousculer la poussière, réveiller les cœurs.

Avec Papy et Mamy, spectacle sans paroles mais non sans langage, Pierre-Jean Cherer s’inscrit dans la filiation assumée des poètes du burlesque tendre . Ici, tout passe par le corps, la mimique, l’onomatopée. Un théâtre du presque rien, où le grommelot devient syntaxe, où les gestes racontent ce que les mots taisent. Et contre toute attente, on comprend tout.

L’élégance de la mise en scène de Pierre-Jean Chérer réside dans ce minimalisme expressif. Elle laisse toute sa place à l’interprétation, à cette pantomime du quotidien qui bascule parfois dans le rêve, souvent dans le cocasse. Car c’est aussi cela Papy et Mamy ,une farce douce-amère sur la décrépitude, la dépendance et les restes de désir, enfouis sous la nappe .

Marie-Bénédicte Roy, exquise Mamy tout en malice , compose un personnage à la fois lunaire et attendrissant mais il arrive aussi que Mamie se montre un peu cruelle avec Papy d’une manière sèche, parfois moqueuse, presque ingrate mais dans une dynamique qui fait rire, tant elle sonne juste. Face à elle, Pierre-Jean Cherer campe un Papy à la fois rouspéteur, coquin et d’une drôlerie irrésistible. Le duo, complice, crève la scène sans hausser le ton. Autour d’eux, l’aide à domicile et le kiné incarnés par Sarah Ibrahim et Clément Cherer insufflent souffle et fraîcheur, entre chant et rap , comme une jeunesse perdue qui danse encore dans les coins de la mémoire.

Et pourtant,un petit bémol. Malgré cette sincérité et le talent des comédiens, certaines scènes souffrent de longueurs qui affaiblissent l’émotion patiemment construite. C’est dommage, car ces instants flottants viennent parfois rompre la délicatesse de la pièce.

Papy et Mamy nous laisse un goût doux-amer, entre rire tendre et mélancolie tapie. Une mécanique du cœur usé, mais encore battant. On en sort ému, presque rajeuni. Et l’on se surprend à tendre l’oreille aux silences, désormais si bavards.

Fanny Inesta

De Pierre Jean Cherer

avec: Clément Cherer, Pierre-Jean Cherer, Sarah Ibrahim ou Maëva Verliac Marie-Bénédicte Roy