Mon Truc En Plumes d'Auteur-e-s
- Fanny Inesta
- 3 mai
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 5 mai
2 et 3 mai 2025 à 19h à l'Atelier Florentin Avignon
et du 5 au 26 juillet 2025à 10H à l'Atelier 44
44 Rue Thiers Avignon
Ils seront là pendant le festivald’Avignon à 10h : , il faut commencer par eux. Une heure suspendue, hors du temps, où l’on se rappelle pourquoi on aime le off d’Avignon : pour ces moments rares et essentiels. Et surtout, parce que ce spectacle réveille l’âme avec tendresse comme un fil rouge, une boussole poétique, un repère nécessaire dans le tumulte du Off.
Il y a des noms qui s’effacent doucement, comme des empreintes sur du velours. Zizi Jeanmaire en fait partie. Icône aux plumes noires, diva du music-hall, elle appartenait à un temps que l’on croit révolu. Et puis surgit Lionel Damei. Et soudain, l’oubli s’éclipse, balayé par une présence, un frisson, une voix, un souffle, un geste gracieux et la mémoire palpite à nouveau.
Dès les premières notes, quelque chose se passe. Lionel Damei entre en scène avec la délicatesse de ceux qui n’ont rien à prouver, mais tout à offrir. Sa voix, troublante, est un instrument à elle seule, tour à tour caresse ou lame douce. Il ne convoque pas Zizi Jeanmaire, il l’incarne à sa manière, dans un souffle personnel, vibrant, pudique.
Ce n’est pas d’un hommage fidèle, il s’enrichit des propres textes de Lionel Damei, glissés avec justesse parmi les chansons du répertoire. Ces compositions s’intègrent sans rupture, comme si elles avaient toujours appartenu à cette constellation musicale. Elles prolongent, éclairent, parfois répondent dans une résonance intime. Le passé et le présent dialoguent alors en sourdine, avec élégance. Sur scène, le corps devient parole, la parole devient danse. Lionel Damei ne joue pas Zizi : il la traverse, il l’habite, il en épouse les élans et les silences. Il chante, il se déploie, ses gestes sont précis, ses ondulations presque liquides.Mais l’élégance et la grâce de Lionel n'interdisent pas l’indignation. Avec "Une fleur à mon oreille",(L. Damei et Claude Gomez), le spectacle ose une brèche contemporaine. Sur une mélodie douce-amère, il dénonce sans détour la bêtise crasse, l’ignorance violente : Dans un transport en commun, à Marseille, à Paris, ceux qui ricanent, insultent ou frappent deux jeunes garçons pour un simple fleur à l'oreille. Un morceau courageux, pudique dans sa forme, mais cinglant dans son propos.
Il y a là, dans cette alternance de révolte douce, d’humour et de mélancolie, tout ce qui faisait la singularité de Zizi Jeanmaire : une femme qui, déjà, dansait à contre-courant. La chanson. "Entre rires et chagrins "(Valentine Petit et Richard Galliano) donne la tonalité d’un spectacle tout en clair-obscur, à l’image de Zizi Jeanmaire elle-même, muse insaisissable entre la rigueur du geste et l’éclat du clin d’œil.
L’accordéon de Nicolas Almosni prend toute sa dimension. Non pas simple accompagnateur, mais véritable partenaire de scène, il tisse à chaque instant un dialogue précis avec la voix et le corps tout en sensualité de Lionel Damei. Les croches, les silences, les frottements d’air , tout est vivant, vibrant, profondément incarné. Par instants, l’instrument semble respirer et dans lequel Lionel peut s’abandonner.
Nicolas Almosni ne joue pas : il raconte, il habite, il dessine. Sa musicalité, presque chorégraphique, donne au spectacle sa respiration intérieure. Ses notes glissent, soutiennent, provoquent parfois. Un fil invisible relie les deux artistes et ce fil, tendu entre mots et musique, fait naître l’ émotion .
Zizi revient alors, non comme une effigie mais comme une énergie diffuse. On redécouvre, grâce aux textes d’Aragon, Gainsbourg, Barbara, Léo Ferré combien elle fut muse et combien elle continue, par ricochet, d’inspirer. Mais c’est bien une œuvre vivante que l’on découvre : un chant d’amour pour la scène, pour les mots, pour l’identité plurielle.
Un spectacle à fleur de peau, entre hommage et confidence, où deux artistes unissent leurs souffles pour réinventer la mémoire.
Et on comprend, grâce à Lionel Damei, que certaines étoiles ne s’éteignent jamais vraiment : il suffit d’un interprète habité pour qu’elles brillent à nouveau.
Fanny Inesta
Avec Lionel Damei au chant
Nicolas Almosni ou Noé Clerc accordéon et arrangements
Je n'ai pas eu la chance de voir ce spectacle, mais au vu de cette critique et des commentaires, assurément je viendrai découvrir durant le festival. Apparemment, une belle façon de le débuter! Merci pour votre site où les articles fort bien détaillés et écrits donnent vite envie de quitter Paris pour voir tous ces spectacles dont vous parlez si bien! Bravo à votre équipe!
Lionel Damei est un OVNI !
Il surprend, attire, charme et nous laisse abasourdi, comme stupéfaits de le retrouver,à chacun de ses spectacles, aussi extraordinaire. Entre talent et perfectionisme, sa sensibilité extrême, rencontre l'univers d'une poésie personnelle bien charnelle dans laquelle la voix complice du corps danse des textes subtiles. Ne pas le connaître ou ne pas le rencontrer est plus qu'une faute de goût, un manque de curiosité et de sagacité. Laisser vous surprendre et emmener par la grâce et le talent !
Lionel Damei est un OVNI ou, qui sait,un ange.
Nadine Eid
Un spectacle magnifique et cette plume sublime met bien à leur juste valeur les artistes!