Gelsomina
- Nadine Eid

- 12 juil.
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 26 juil.
FESTIVAL AVIGNON OFF 2025
Théâtre la petite caserne
119 rue Carreterie Avignon
Du 5 au 26 juillet Festival Off à 11h le 6, 8, 12, 14, 16, 18, 20, 22 et 26 à 11h
Durée 1h

Lorsque le théâtre s’empare d’un personnage de film de Fellini aussi illustre que La Strada - film oscarisé à Hollywood- on peut s’attendre à ce que, le public curieux compare le jeu de l’actrice Guiletta Masina à celui de la comédienne sur scène. L’écriture de Pierrette Dupoyet évite totalement cet écueil. Elle crée subtilement un personnage de théâtre qui prend vie et corps devant le public.
Avec une économie de moyens, d’effets et de procédés attendus, Marie Joséphine Susini dessine Gelsomina. Pour incarner, s’approprier avec justesse cette femme-enfant étonnante, crédule et si naïve qu’elle pourrait être presque perçue comme quasi simplette, il faut une comédienne bien aguerrie aux rôles forts, puissants comme des défis, superbes de verticalité. Dès son entrée en scène, Marie- Joséphine Susini autrement connue sous le plus court nom de Zouzou nous entraine dans son évocation.
Cédée, vendue par la pauvreté de sa mère à un forain ambulant Zampano, la jeune femme-enfant parcourt les routes pour vivre avec lui, de représentations en foires ou numéros clownesques, une Strada dont le parcours initiatique peu à peu modifie les données du départ. L’initiateur devient lui même initié par son initiée et l’interpénétration des rôles bouleverse la trajectoire mais surtout modifie les personnages qui deviennent, par jeux de miroirs, des révélateurs et des actants. Il a suffi qu’un Fou funambule soit l’adjuvant…
Dominée par Zampano personnage si peu amène qu’il en devient brutal, Gelsomina par ses mots, ses remarques et surtout son regard porté sur le monde devient celle par qui la brute va se fragiliser. Ceux qui connaisse le film, se souviennent de la scène dans laquelle Zampano, Anthony Quinn, face à la mer s’effondre.
La narration haute en couleurs felliniennes, est superbement interprétée par Marie-Joséphine Susini. Sa propre mise en scène est doublement efficace et lumineuse. Une botte de paille sous le soleil d’un projecteur suffit à nous faire entendre la musique de Nino Rota. Cependant c’est Zouzou qu’on entend et qu’on voit, celle qui vraiment nous cueille. Elle s’empare magistralement du personnage qu’elle campe avec une sobriété telle que, parfois même, le sourire de la comédienne formule avec une poignante vérité les mots tus. Et là, c’est de l’excellent théâtre. La ténuité des suggestions, des peut-être ou des points de suspension, elle les maitrise si parfaitement que, pour le spectateur, c’est jubilatoire ! Elle semble ainsi s’approcher sans hâte d’un personnage si léger, si fin et pourtant si étrangement fort que l’émotion est cueillie. Les yeux s’embuent, la gorge s’étreint. On résiste ou on cède mais qu’importe, elle nous fait vivre, là, devant nous, sur scène, sans conteste, sa Gelsomina !
Une inconditionnelle admiration pour son jeu, un sourire pour son aptitude à travailler les registres de l’émotion qu’elle maîtrise parfaitement, un respect pour celui qu’elle accorde à son public depuis toujours !
A voir et bien sûr à revoir sans modération.
Nadine Eid
Gelsomina jours pairs /Anna Magnani, le temps d’une messe jours impairs
D’après La Strada de Federico Fellini
De Pierrette Dupoyet
Mise en scène Marie-Joséphine Susini
Interprétation Marie-Joséphine Susini
Compagnie Ecl’adâm
Le regard d'Aurélie Courteille
« Tiens, regarde ce petit caillou…tu te dis, il est par terre, il ne sert à rien…et bien tu te trompes Gelsomina. Même lui il sert à quelque chose. Et c’est pareil pour tout, pour les étoiles, pour les gens, pour les fous…y’a une raison à tout. Dans l’univers, y’a un architecte très savant… » (dixit Il Matto, dit Le Fou, Gelsomina)
Seule sur scène, éloquente et probante, Marie-Joséphine SUSINI vous entraîne à vivre une aventure sans précédent, révélant les rêves et les tourments de cette femme, Gelsomina, restée dans l’ombre car déconsidérée de tous.
Écrit d’après le personnage de La Strada crée par Fellini, Gelsomina, de Pierrette Dupoyet, est une comédie mélodramatique où l’héroïne se présente comme une jeune femme humble et modeste qui, ici, apparait tel un petit oiseau au caractère fort mais aux ailes bien fragiles.
Sa nature serviable et conciliante l’entraîne à supporter bien des boutades et des comportements machistes venus du grand Zampano, cet être sombre et autoritaire dont elle accepte d’être la compagne de route ; jusqu’au jour où, rencontrant un homme spirituel et altruiste dit « Le Fou », elle ouvrira les yeux pour enfin vouloir prendre son envol. Mais dans quelles conditions ? Et le pourra-t-elle vraiment ? Pourra-t-elle se libérer pleinement de cet homme fort et égoïste qu’est Zampano ? Ce sera là toute la question.
À travers cette mise en scène sobre et dépouillée, quoique évocatrice de l’univers des bords de route et des chemins de campagnes, Marie-Joséphine Susini fait donc rayonner le personnage de Gelsomina avec fougue, poésie et virtuosité, appelant les cœurs et les esprits à prendre conscience du retentissement et des impacts que nourrit la déconsidération faite aux femmes, aux hommes et à chaque élément qui peuple l’univers.
« On devrait toujours se demander d’où viennent les choses, et comment elles ont commencé à exister ! » Et surtout où va le monde.
Tel un cri d’exaspération appelant à faire réagir et réfléchir celui qui nous fait face, Gelsomina s’affiche ainsi comme un récit d’existence qui éveillera toujours et encore bien des consciences sur l’importance du respect, de l’attention et de la bienveillance à avoir pour chaque être qui nous entoure.
Le public ne pourra être qu’admiratif et stupéfait face au jeu de Marie-Joséphine, incarnant cette femme meurtrie qui se déploie devant eux, marquant les esprits à jamais.
Une artiste à découvrir.









Une pure merveille. Un des plus beaux spectacles que je n’ai jamais vu !
Si puissant et d'unebeauté hors normes comme cet amour puissant et enfoui...