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Anatomie d'une actrice

  • Photo du rédacteur: Fanny Inesta
    Fanny Inesta
  • 12 juin
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 13 juin

Théâtre du Roi René Avignon

Festival OFF 2025 du 5 au 26 juillet à 11h 55

Relâche le 9,16,23

Crédit photo: Julien Jovelin



Il serait vain de trop en dire. Anatomie d’une actrice est de ces pièces qui se dévoilent lentement, par strates. L’émotion n’explose jamais, elle s’insinue...



Dans cette pièce à deux voix, Hélène et Lola Zidi s’emparent d’un espace, celui d’une loge de théâtre pour y explorer les vertiges de la transmission, de l’oubli, et de cette chose étrange qu'est l’amour maternel...

Suzanne, en tenue de scène, actrice aguerrie,maquillée, semble prête à répéter son texte encore une fois. Vieillir quand on est actrice, c’est souvent voir les projecteurs se détourner, alors même qu’on a enfin tant à dire... Mais ce soir, les répliques lui échappent. Juliette, l’assiste, où plutôt, la soutient. Partenaire ,elle l'incite à continuer, lui souffle les mots. Suzanne s’énerve «  Mais arrête, je connais mon texte »..


.La scène, d’abord théâtre du jeu, devient lentement le théâtre d’un trouble. Quelque chose affleure, un non-dit, un vertige. Et l’on comprend : ce qui se joue n’est pas qu’un rôle.

Coécrit et interprété par ces deux comédiennes complices, ce projet a tout d’un tissage : des fils intimes, des répliques entremêlées, une parole qui se cherche, se perd, se retrouve. On croit d’abord à une mise en abyme douce du métier d’actrice, à un dialogue entre générations sur la passion du théâtre. Et l’on n’a pas tort. Mais au fil du spectacle se glisse une autre histoire , plus souterraine, plus troublante. Quelque chose résiste, échappe, s'efface. Elles convoquent leurs souvenirs de scène . Peu à peu, les rôles s’inversent. Et ce sont les souvenirs eux-mêmes qui semblent devenir personnages.

Ce qui s’annonce comme une répétition devient un drame feutré. Les mots se perdent, et l’on devine peu à peu les blessures d’enfance, les silences non dits, les gestes d’amour manqués.


Mais quelle belle harmonie entre elles Aucune démonstration, aucun ego. Hélène Zidi offre sa présence comme un écrin laissant à Lola Zidi l’espace pour briller sans jamais s’éteindre elle-même. Leurs voix se répondent, s’élèvent, s’entrelacent, dans une partition parfaitement maîtrisée, émouvante sans jamais forcer l’émotion. Hélène Zidi livre une performance digne des plus grands. Elle passe du rire (car oui, il y a aussi de l'humour!) à la déchirure avec facilité . Elle ne joue pas un rôle elle habite chaque facette de cette femme perdue. Lola Zidi, incarne cette jeune femme en quête d’amour avec une sincérité sans fard. Leur complicité, jamais ostentatoire, donne au propos une justesse troublante. Car au fond, le spectacle parle de cela : du besoin d’aimer et d’être vu. Par le public. Par sa mère. Par soi-même.Et c’est toute la tragédie discrète de cette pièce : ce qu’une mère oublie, ce qu’une fille attend encore. Et c’est bouleversant.

La scénographie de Jean-Michel Adam épouse le trouble avec intelligence : un grand miroir tel une mémoire fragmentée, des panneaux mobiles qui dessinent des zones de présence, d'absence, d'enfermement, tout bouge, reflète, se dérobe, . C'est une mémoire en mouvement que l'on regarde, ainsi que la lumière d’une précision virtuose (signée Denis Koransky) qui éclaire autant qu’elle efface.

Le théâtre devient ici refuge, rituel de résistance, dernier rempart contre la disparition. La mémoire y est un personnage à part entière, capricieuse, fuyante, parfois cruelle. Mais aussi, paradoxalement, une matière poétique, fertile, qui permet de rejouer l’amour autant que la douleur,

À la fin de la représentation, un silence. Puis les applaudissements. Et certains spectateurs, les larmes aux yeux, quittent la salle bouleversés. Non pas écrasés par le pathos, mais touchés en plein cœur par ce que le spectacle réveille : une mère, un souvenir, un mot non dit.


Une œuvre pudique, lumineuse et bouleversante.


Fanny Inesta



Mise en scène: Hélène Zidi et Lola Zidi

Avec : Hélène Zidi et Lola Zidi

Scénographie: Jean-Michel Adam

Création Lumière: Denis Koransky

Création son: Alain Governatori



Le regard de Peter Barnouw


Le public se trouve face à une scène presque nue. Un miroir, deux fauteuils, une toute petite estrade et quelques écrans transparents.

Manifestement nous nous trouvons, quelque part dans un théâtre. Dans les coulisses ou les loges des artistes.

Une femme, habillée en blanc apparaît. Elle répète son texte. Sa partenaire de jeu, plus jeune, l’aide. Parfois, avant d’entrer en scène, les actrices et les acteurs effectuent des exercices de voix, récitent des bouts de texte.

Là, nous nous apercevons que quelque chose ne va pas. Des oublis trop importantes. Une  tension, proche de la panique, s’installe.

Soudain, nous ne sommes plus très certains de qui est qui. La jeune femme, est-elle vraiment son partenaire de scène? L’actrice plus âgée, est-elle vraiment sur scène ou est-elle en train de jouer un rôle mais qui n’est pas celui de Phèdre, ou d’Antigone ou d’un Shakespeare quelconque?

Des souvenirs remontent et progressivement l’on comprend que l’actrice habillée en blanc ne sait plus vraiment qui elle est et qu’est-ce qu’elle fait. Que doit-elle jouer ? Une mère ? Sa fille ?

Nous sommes là, devant un texte écrit par Hélène et Lola Zidi et interprété par ces deux femmes. Mère et fille. Fille et mère.

Nous suivons un texte fort. Il traite de ce que l’on rencontre souvent. Dans presque toutes relations familiales : l’oubli, la détérioration de la pensée. De ne plus savoir qui est qui. Qui l’on est en vérité.

Le texte est fort. Peut-être avec quelques longueurs mais l’on ne remarque pas vraiment puisque l’on se laisse totalement prendre par le jeu, par la façon de jouer.

Deux femmes qui jouent remarquablement. Dans une mise en scène soignée avec un décor assez minimaliste mais efficace. Avec un éclairage scénique soulignant de manière juste  et parfaite les différentes phases de jeu.

Nous savions Hélène et Lola Zidi très bonnes actrices. Elles l’avaient déjà prouvé l’année dernière avec Camille contre Claudel et la production de cette année va encore plus loin.

Le jeu d’une confrontation, d’un duel entre Mère et Fille, entre vérité et mensonge, entre réalité et le refuge de la perte de mémoire.

Du vrai théâtre avec de vraies émotions. Un spectacle où l’on peut ressentir quelques rires et où l’on a le droit sentir quelques larmes.

Du beau théâtre. Du vrai théâtre. À voir. Sans hésitation.

2 Comments

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Guest
Jun 13
Rated 5 out of 5 stars.

Magnifique article, qui me donne tout simplement envie d'aller voir. L'histoire si bien mise en valeur dans ces mots, on imagine ce texte dit par ces deux comédiennes que l'on pense talentueuses dans un sujet universel et tellement d'actualité. Merci pour ce partage.

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Guest
Jun 13
Rated 5 out of 5 stars.

Que de beauté et de pudeur dans ces mots! Je le note ce spectacle! Je le note!!!

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A Propos

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Nous sommes Fanny Inesta et Jean-Michel Gautier, chroniqueurs indépendants et surtout passionnés de théâtre, d’expositions, et de culture en général. A ce jour, nous créons notre propre site, avec nos coups de coeur et parfois nos coups de griffes… que nous partageons avec vous.

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