Le repas des fauves

Théâtre de l'Archipel

25 Rue du rempart de l'Oulle Avignon

Vendredi 15 Novembre 2024 à 20h30

Dimanche 17 Novembre 2024 à 16h

L’intrigue se déroule en 1942, au cœur d’un appartement cossu, où le quotidien d’un groupe d’amis bourgeois français semble suspendu entre les privations de la guerre et une envie de légèreté. Ce soir-là, on fête l’anniversaire de Sophie la maîtresse de maison, le tout dans une ambiance à la fois feutrée et insouciante. Mais cette quiétude est brutalement brisée : un attentat contre des officiers allemands en bas de l’immeuble précipite la Gestapo sur les lieux. La sentence est implacable : deux otages par appartement. Dans un cruel retournement du destin, le chef S.S., un habitué des lieux pour ses achats de livres rares, accorde aux convives un dernier sursis de deux heures -jusqu’au dessert - pour désigner eux-mêmes les sacrifiés.

Dès cet instant, l’atmosphère festive cède à une tension insoutenable. La convivialité, l’amitié si bien incarnées se délite au contact de la peur, laissant éclater des vérités enfouies. Ce huis -clos révèle non seulement la barbarie d’une époque, mais surtout la fragilité des liens humains face à la mort imminente. Le suspense reste entier jusqu’au bout, maintenant le public en haleine.

Le décor, quant à lui, est une réussite : une table soigneusement dressée avec élégance , un salon richement meublé, dominé par une bibliothèque imposante que l’on aperçoit en transparence qui capte l’attention – et celle du personnage du SS qui s'y réfugie, laissant les convives prendre leur décision. Ces éléments, savamment intégrés, participent à l’atmosphère de la pièce, où chaque détail semble chargé de sens.

La mise en scène orchestrée par Anaïs Gabay parvient à éveiller le suspense construit avec une précision chirurgicale. Un huis clos oppressant où chaque instant semble chargé de danger.

Jérôme Tomray, menaçant, redoutable et cynique dans le rôle de l’officier S.S., impose une présence oppressante. Il nous offre une interprétation remarquable, alliant charisme glaçant et nuances subtiles ,tandis que les invités viennent compléter ce kaléidoscope de caractères . Chacun d’entre eux représente une facette de la société française de l’époque.

Le jeu de quelques comédiens bien que parfois inégal, reflète un engagement authentique. Certains montrent encore des signes d’hésitation, mais leur progression semble prometteuse, soutenue par leur apprentissage théâtral en cours. Ce genre de vulnérabilité scénique apporte aussi une forme d’authenticité et rend d’autant plus touchant le travail collectif. Le choix d’Anaïs Gabay de proposer un texte exigeant à ses élèves reflète un pari audacieux et pédagogique. En s’attaquant à une pièce qui mêle intensité dramatique, subtilité psychologique et défis scéniques, elle élève clairement les attentes et pousse ses apprentis comédiens à dépasser leurs limites.Le public, bien qu’éventuellement confronté à quelques imperfections, a sans doute perçu l’énergie, le travail et la sincérité qui transparaissent de ces moments de théâtre.

Une pièce qui explore des thèmes universels : la peur, la lâcheté, la solidarité, et les dilemmes moraux., où se mêlent panique, tendresse et colère. Le public en ressort avec cette question lancinante : que ferions-nous à leur place ?

Cette pièce est un miroir de l’humanité en temps de crise. À voir absolument, pour réfléchir, frissonner et, peut-être, se reconnaître.

Fanny Inesta

Auteur : Vahé Katcha

Guillaume Hawecker / Victor

Virginie André / Sophie

Caty Barascud / Françoise

Philippe Groléat / Pierre

Christian Di Ruggiero /André

Philippe Folcher / Le docteur

Et Jérome Tomray / Major Kaubach