Le Jeu du Président
DECEMBRE 2021
Théâtre du Chêne Noir
Le Chêne Noir dans les ors de la république,
Dans un décor somptueux un président et ses conseillers organisent le pouvoir. C‘est alors une succession de crocs en jambe et même plus car affinité entre certains. Ces gens sont tous détestables, imbus d’eux-mêmes, profitant de leur situation ils entrent et sortent avec la régularité d’un coucou suisse apparaissant à la porte de l’horloge.
Sur un podium tapissé de rouge et or un fauteuil domine la pièce, siège du pouvoir comme au temps de nos rois, mais la pompe d’autrefois n’est pas là il n’y a que ce siège témoin d’une charge où l’apparence garde encore toute sa place dans les lambris de la république.
Originalité, notre président a un conseiller véreux qui étonnamment veut sa perte, il veut combattre les idées du pouvoir qui sont à l’opposé des siennes. Pire encore sa fille est une valkyrie du net, elle a derrière son blog une foule qui la suit dans la critique du pouvoir en place. Drôle de situation qui sera rapidement modifiée car elle sera invitée à rentrer au sérail où elle sera appréciée par le président au point de prendre la place de son père.
On le voit, le pouvoir est peu de chose et surtout est un panier de crabes où les places sont comptées alors on s’y accroche par tous les moyens, enregistrements vidéo ou sonores, menaces… tout est bon pour avancer, mais vers où ?
Julien Gélas peint à grands coups de pinceaux cette organisation qui nous dirige, s’appuyant sur bien des situations des gouvernements qui se sont succédé au pouvoir ces dernières années.
C’est assez léger, un peu confondant, portrait d’un monde pourri où tous les coups sont permis.
Une équipe de comédiens sous la férule de Gérard Gélas occupe la scène avec talent, c’est tonique, enlevé et gluant à souhait. Ce pouvoir à la noirceur d’un matin dans une tragédie anglicane. C’est la mise en scène et en abîme d’une tragicomédie grinçante sur un pouvoir démocratique en pleine déliquescence. Le duo Gélas père fils est en pleine harmonie.
Jean Michel Gautier
À l’image du Président de la République tout à sa gloire et à sa puissance, le décor est posé.
Un trône étincelant comme pièce maîtresse et un tapis déployé faisant étalage des richesses de l’État . Le tout rayonnant des splendeurs passées et présentes où la folie des grandeurs est de mise.
Ce Président est indécis dans ses choix et ses actions à mener, presque une absence de volonté politique. Fort heureusement, son conseiller est là… sauf que ce dernier n’a qu’un dessein : amener le Président à sa perte. Sa fille, complice utilise un pseudonyme sur son compte twitter. Ses idées sont à l’opposé de celles du Président et elle compte des centaines de followers qui la suivent dans son combat. Découverte par les services du pouvoir, elle sera convoquée dans les bureaux de l’Élysée où le Président en personne lui signera un contrat. Un pacte qui réoriente et fera basculer des destins.
Il fallait la folie créatrice de Julien Gélas pour se lancer dans un spectacle de mi-fiction et mi-réalité bien présente ! Il s’amuse à jouer avec tous les possibles qu’offre une pièce de théâtre, les parts sombres de l’humain, les tentatives avortées, le pouvoir et ses abus, les actes illégaux, il distille avec force les travers de la politique, le goût de l’ambition et la sombre nécessité d’être reconnu de ses pairs.
Le rythme est frénétique et l’énergie démoniaque. Les dialogues percutent, bousculent et font grincer des dents. Le burlesque de leur situation, constat tragique mais où l’on ne peut s’empêcher de rire sans trop se forcer .
La grande qualité de la mise en scène est d’avoir pensé une scénographie qui nous plonge dans une atmosphère propice à tous ces travers politiques, où le fonctionnement des services de l’État sont des arguments chocs, ou les révélations, répliques et anecdotes encore d’actualité fusent . Un spectacle qui surfe et s’amuse du crédible dans une scénographie théâtralisée pleine d’humour.
La lumière est à saluer car elle est pleine de finesse et de précision et les choix musicaux sont excellents.
Les comédiens sont tous justes et précis mais il faut souligner particulièrement le jeu d’Alain Leempoel qui campe un Président avec une ressemblance frappante avec notre Président actuel.
Une bonne occasion d’aller au théâtre, le pièce se joue jusqu’au 19 décembre.
Fanny Inesta
de Julien Gélas Mise en scène de Gérard Gélas
Avec Alain Leepoel,
Didier Brice,
Andréa Brusque,
David Talbot,
Emmanuel Lemire,
François Brett.
Assistant mise en scène Mouloud Belaïdi Scénographie Thierry Flamand Direction technique Florian Derval Création lumière Gérard Gélas Régie Samuel Dumas
et Fabrice Viste
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