Ita L. née Goldfeld
Dernière mise à jour : 16 juin 2024
Théâtre de l'Oriflamme
Rue du portail Matheron Avignon
Le 14 juin à 19h30
et du 3 au 21 Juillet 2024
Festival Off à 17h30 (relâche lundi 8 et 15)

Ita a existé. Françoise Nahon l'incarne. Sur un texte d'Éric Zanettacci qui est le petit-fils de cette ex-Ukrainienne, qui a fui son pays à la fin de la première guerre mondiale pour rejoindre la France.
Nous sommes à Paris en 1942, dans l’intérieur simple d’un petit appartement où entre photos de famille, une menorah,un bureau et quelques chaises, Ital L. face au public prend la parole et raconte. Avant la guerre à Paris, elle se remémore son pays , elle raconte son mariage, les terribles pogroms, et Odessa, sa terre natale. Les souvenirs de ces temps révolus, mêlés de joie et de douleur, lui rappellent un passé lointain et une vie autrefois malgré tout paisible, puisque entourée des siens.
Ita L. est trop bonne pour croire au pire, trop optimiste pour imaginer l’inimaginable. La confiance qu'elle place dans le pays où ses proches ont servi avec dévouement comme soldat et infirmière, ce Paris qui l'a accueillie, ressenti comme un abri de gratitude, devient une cruelle désillusion.
Son mari Salomon a été gazé, son fils emmené à Drancy... elle est à présent seule et vieille. La police française frappe à sa porte , lui laissant une heure pour faire sa valise avant de les suivre.Peut-être pour lui permettre de s’enfuir ? Mais où irait-t-elle affublée de son manteau avec l'étoile jaune? Ce laps de temps entre la vie est la mort devient le cadre temporel de l’histoire.
Dans le regard d’Ita L. interprété par Françoise Nahon, c’est le drame de n’avoir plus son mari, de ne plus voir ses enfants, la peur de quitter sa maison, de lutter quotidiennement contre sa solitude, contre ses voisins qui ne sont plus ses amis... Pas de plainte ou de rancoeur dans ce récit. Comme un mektoub qui flirte avec l’enfer et qu’elle porte de toutes ses forces avec ses craintes et ses horreurs, entre sacrifice, survie et espoir.
Un texte épuré , sans envolées de style, ni excès dramatiques qui se distingue par sa dignité. Cette pièce privilégie la clarté et la sobriété de son propos, un choix fort. Toutefois, cette épure n’ôte rien à l’émotion. Françoise Nahon nous émeut par sa crédulité, éclairant la tragédie sans pathétisme . L'absence de fioritures stylistiques permet au récit de se concentrer sur l'essentiel : le destin bouleversant de cette femme, dont la bonté et la naïveté contrastent avec les horreurs qui l’entourent un choix qui s’avère puissant.
Une poignante interprétation, une mise en scène et une écriture au service de la mémoire de ces années terribles afin qu’elles ne soient jamais oubliées.
Fanny Inesta
D'Eric Zanettacci
Mise en scène: Patrick Zeff-Samet
Avec: Françoise Nahon
Musique: Elisa Munoz
Création lumière et régie: Thibault Caligaris
Scénographie: Tony Munoz
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